Identité sexuelle : innée ou acquise ?

Complet Psychologie et vie chrétienne

Les personnes homosexuelles disent ne pas avoir eu à choisir leur orientation, découverte le plus souvent à l’adolescence. Certaines la refusent et luttent contre elle. D’autres finissent par l’admettre, l’assument et affirment que cela fait partie de leur personnalité depuis toujours. 

Quelles peuvent donc être les parts de l’inné et de l’acquis dans l’origine de l’homosexualité ?

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Identité sexuelle : innée ou acquise ?

LE DÉBAT : INNÉ OU ACQUIS ?

Autrefois, de manière simpliste, l’identité sexuelle reposait seulement sur la distinction physique homme/femme. Tout individu était sexué selon son corps et devait avoir le comportement correspondant : l’attirance sexuelle était normale, naturelle, pour quelqu’un de l’autre sexe et elle était anormale, contre nature, pour quelqu’un du même sexe. 

L’identité sexuelle ne repose plus seulement sur l’anatomie, mais sur ce que la personne considère comme caractéristique de sa personnalité. 

On distingue maintenant : 

Le sexe morphologique

L’orientation sexuelle qui précise quel est l’objet de l’attirance sexuelle

Le genre, auquel la personne estime appartenir, quels que soient le sexe de son corps et son orientation.

Le sexe morphologique fait évidemment partie de l’inné. Il est fixé définitivement dès la fécondation par la rencontre d’un spermatozoïde et d’un ovule. La 23ème paire de chromosomes détermine le sexe : XX pour une femme, XY pour un homme. 

Il peut arriver des anomalies dans la recomposition génétique qui se fait lors de la fécondation. On connaît l’exemple de la trisomie 21 qui donne le mongolisme. De même, lorsque ces anomalies affectent la paire de chromosomes sexuels (un seul X, XXX, XXY), on constate des cas d’intersexualité. Des déséquilibres hormonaux de la mère ou du fœtus lui-même peuvent aussi perturber son développement génital avec atrophie ou hypertrophie anormale des organes génitaux d’un sexe, ou de l’autre, ou des deux. Dans ces cas, très rares, d’anomalies génétiques avec des répercussions morphologiques, des personnes peuvent être biologiquement transsexuelles, mais ne sont pas nécessairement homosexuelles. Ces anomalies n'ont pas d'effet direct sur le sexe psychologique qui dépend beaucoup plus du sexe officiellement attribué à la naissance. Le choix du sexe à déclarer est donné par les médecins en fonction du cas et du développement prévisible de l’enfant. C’est ce sexe déclaré qui est reconnu socialement et dans lequel l’enfant est normalement élevé. À l'inverse, sauf de très rares exceptions, les homosexuels et la très grande majorité des gens qui se disent transsexuels ne présentent aucune anomalie sexuelle anatomique ou fonctionnelle.

Concernant l’orientation sexuelle, il peut y avoir une préférence psychologique, une attirance affective, parfois inconsciente, ou sexuelle, pour des personnes de l’un ou l’autre sexe. On classe habituellement les gens selon leurs préférences de partenaires entre hétérosexuels, homosexuels exclusifs, ou bisexuels. 

Concernant l’identité de genre, la société, en proclamant le droit à l’épanouissement personnel et la liberté de tout individu, a fini par prendre en compte la revendication de certaines personnes qui se sentaient mal à l’aise dans un sexe imposé par leur corps et dans lequel elles ne se reconnaissaient pas. Aussi est-on arrivé à disjoindre l’identité sexuelle, morphologique et l’identité de genre, choisie. Cette notion de genre choisi, plutôt que de sexe assigné par le corps, est celle qu’il faut maintenant enseigner dans les établissements scolaires.

PISTES DE RÉFLEXION

On voit donc que l’identité sexuelle est complexe. S’il y a un débat permanent entre l’inné et l’acquis dans l’origine des aptitudes et des comportements humains, il concerne aussi la sexualité et je vais essayer d’ouvrir quelques pistes de réflexion. S’il existe des facteurs génétiques, quelle part de liberté et de responsabilité personnelle reste-t-il à la personne ? Existerait-il un déterminisme dont il serait impossible de sortir ?

Des gens peuvent ressentir de manière différente des désirs homosexuels, des tentations, pour les chrétiens. On ne peut donc pas décrire d'une manière générale la personne homosexuelle type. S'agit-il de la personne jugée par les autres comme homosexuelle, de la personne qui subit malgré elle des désirs homosexuels qu’elle ne souhaite pas et sans pratiquer, ou de celle qui assume socialement cette orientation ?

Le sujet est trop complexe pour qu’on puisse simplement dresser des listes d’arguments en faveur de l’origine innée ou acquise de l’homosexualité. Je vais d’abord essayer de préciser un peu ce qu'est l'homosexualité. Ensuite, je citerai quelques causes parmi celles qui reviennent le plus souvent dans l’histoire des personnes concernées. Ainsi pourra-t-on avoir une idée de ce qui pourrait provenir de l’inné et de l’acquis.


L'homosexualité est un phénomène constaté depuis toujours, et pourtant que l'on connaît très mal en dehors de l’interdit biblique, tellement mal qu'on ne sait pas dans quelle rubrique le classer.
Maladie ? Pour qu'il y ait maladie, il faut un fondement organique dans l'anatomie, la physiologie ou encore un dysfonctionnement mental, ce qui est déjà plus difficile à définir. Une nouvelle liste vient d’être établie désignant comme maladies toutes sortes de troubles du comportement. L’homosexualité, qui figurait dans la liste des maladies mentales, en a été retirée depuis déjà quelques décennies. Parler de maladie, comme invoquer des prédispositions génétiques, ce serait retirer à l'individu toute responsabilité. Si beaucoup de personnes concernées ont le sentiment de n'avoir pas eu à choisir leur orientation, elles assument leur différence et ne veulent pas être considérées comme des malades. Et même, beaucoup d'homosexuels revendiquent le libre choix de leur homosexualité.

Péché ? Oui, pour les chrétiens, et également pour d’autres religions, puisqu'il s'agit de la transgression d'un interdit. Mais, parler seulement de péché, c'est nier la force de pulsions, non désirées ou non choisies, et généralement impossibles à maîtriser sans le secours de la grâce de Dieu.

Déviance ? Faute de trouver un classement de l'homosexualité qui convienne à tout le monde, on se rabat sur la notion de déviance qui fait référence à des statistiques, bien que beaucoup de gens refusent de considérer comme plus « normal » le comportement de 95% de la population. On constate que l’homosexualité est frappée d'un jugement négatif par la majorité de la population, au-delà de tout clivage religieux ou idéologique. Curieusement, on assiste souvent à des revirements de l’opinion d’une même personne sur l'homosexualité, selon qu’elle réponde à un sondage anonyme, qu’elle soit concernée à cause d’un proche, ou qu’elle ait effectivement dans son entourage une personne homosexuelle.

L'homosexualité est à la fois une déviation sexuelle, par le changement d'objet du désir qui se porte sur un individu de même sexe, et une déviance, en ce que c'est une conduite qui sort du cadre largement majoritaire des normes sociales.

THÉORIE DE BISEXUALITÉ

Selon une idée couramment admise aujourd’hui, il y aurait une certaine bisexualité de tout individu, quel que soit son sexe génétique, qui exercerait une influence sur son comportement.

Cette théorie de la bisexualité biologique originelle tient une place importante dans la psychologie moderne. Elle allait à l'encontre de la classification trop absolue que faisait la société entre des comportements spécifiques masculins ou féminins (rôle viril, éducation des enfants…) et elle s'est développée parallèlement aux mouvements de libération de la femme.
Cette théorie de la bisexualité trouve des justifications dans les données de l'embryologie et de la biologie cellulaire. Au début de la vie fœtale, le tissu cellulaire se développe sans tenir compte du sexe génétique, pourtant déjà fixé lors de la fécondation. Le fonctionnement d'une même cellule peut être modifié dans le sens de l'un ou l'autre sexe sous l'effet de différentes hormones. C'est le cas pour de nombreux transsexuels qui veulent modifier leur aspect. Ces constatations, qui font partie du grand mystère de la vie, ne suffisent pas à fonder une théorie et aucun travail sérieux de laboratoire n'a pu établir un lien quelconque entre cette « bisexualité » cellulaire et une « bisexualité » psychologique.

La différence fondamentale homme/femme n'interdit pas une certaine interchangeabilité des comportements sociaux. Un homme peut aimer s'occuper de tâches ménagères. Une femme peut aimer la mécanique ou des sports violents traditionnellement masculins. C'est une simplification abusive d’évoquer l’homosexualité dès lors que quelqu'un présente des comportements inhabituels pour son sexe.

Créé homme ou femme, l'être humain peut, dans certaines conditions, ressentir une attirance pour les gens du même sexe : attirance affective, sexuelle, ou les deux à la fois. Ce n'est pas toujours une véritable attirance, mais parfois simplement la peur ou le rejet de l'autre sexe. Cette attirance peut être le signe d'une tendance homosexuelle, « l'homosexualité latente » des psychologues, mais ne signifie pas nécessairement une homosexualité confirmée.

DISTINCTIONS

Pour le public mal informé, le terme d'homosexualité regroupe sans nuances des aspects ou des comportements différents. On peut distinguer l'homosexuel homme ou femme (c'est alors une lesbienne) qui éprouve seulement de l'attirance pour quelqu'un de même sexe et désire avoir des relations sexuelles avec lui, le pédophile qui recherche les enfants (mais il ne faut pas faire l’amalgame, il est important de noter que tous les homosexuels ne sont pas pédophiles et tous les pédophiles ne sont pas homosexuels), le travesti qui éprouve du plaisir à s'habiller en femme, mais qui peut avoir une vie hétérosexuelle par ailleurs, le transsexuel qui a le sentiment profond qu'il résulte d'une erreur de la nature qui lui a donné un corps et un aspect physique ne correspondant pas à son sexe véritable. Diverses combinaisons sont possibles entre ces différentes formes.

Il faut se méfier des stéréotypes. Il existe chez les homosexuels une grande diversité dans leurs pratiques, dans leur présentation, dans leur façon de vivre. En dehors de situations caricaturales telles qu’on en voit dans les médias ou d’un affichage ostentatoire de son orientation, rien ne permet de reconnaître une personne homosexuelle.

LOBBY

On peut considérer l'homosexualité comme un phénomène de société, car le fonctionnement social la réprime, la tolère, la permet, ou même l‘encourage ou induit sa libre expression. Dans certaines cultures, l'homosexualité entre adultes n'existe réellement pas, sans que la répression l'empêche de s'exprimer. Dans d'autres cultures, au contraire, l'homosexualité tient une place importante. Les homosexuels y sont nombreux et leurs associations constituent de forts groupes de pression. Minoritaires et souvent rejetés, ils ont besoin de s'affirmer, de présenter leur situation comme normale, de retrouver entre eux une certaine solidarité et d'être reconnus socialement. Leurs combats militants ne sont souvent qu’une recherche de normalité (lois contre l’homophobie, Pacs, mariage homosexuel, droit à avoir des enfants…).
Leur ardeur combative est souvent une réaction contre les jugements, l'oppression dont ils sont victimes, et un moyen de masquer une souffrance profonde, subie, et dont ils ne peuvent sortir. C'est aussi une recherche désespérée d'amour et de valorisation face au rejet qu'ils ont le plus souvent vécu.

Les médias jouent un rôle considérable. Les homosexuels ont souvent des personnalités très riches, extrêmement sensibles et raffinées. Ils sont donc, de tous temps, très présents dans les milieux artistiques et littéraires, le spectacle, le commerce de luxe, la haute couture, le journalisme, la politique. Ainsi, un grand nombre d’animateurs ou de célébrités du petit écran sont notoirement homosexuels.

On peut parler d’un véritable lobby qui investit les médias. Dans de nombreuses émissions de téléréalité, l'homosexualité de certains participants est mise en avant. Il y a quelques années, un couple homosexuel a gagné la maison dans la série télévisée Le Chantier. Curieusement, il en avait été de même dans la première émission de ce genre en Australie. Un autre avait été mis en vedette par une autre téléréalité La Ferme des Célébrités. De nombreuses séries, notamment regardées par les jeunes, présentent des personnages homosexuels. Le but est toujours de banaliser l’homosexualité dans l’opinion et de la présenter comme un choix de vie possible.

Ainsi, les médias donnent une image faussée du nombre d’homosexuels, banalisent l'homosexualité, et même peuvent la rendre attirante. Face à ce véritable matraquage médiatique, il faut savoir que l’homosexualité, au moins vécue concrètement en actes, ne concerne en réalité qu’une petite partie de la population. Une étude commandée par le gouvernement français pour organiser la lutte contre le sida (A. Spira, N. Bajos, etc., Les comportements sexuels en France, La Documentation Française, 1993, page 138) montrait que seulement 1,1% des hommes et 0,3% des femmes avaient eu un rapport avec un partenaire homosexuel pendant l'année précédant l'enquête, 4,1% des hommes et 2.6% des femmes en considérant leur vie entière). Ces chiffres sont relativement stables et comparables à ceux d’autres enquêtes plus anciennes ou plus récentes. Ils sont plus élevés si on considère l'ensemble des personnes qui ont des envies homosexuelles sans être passées à l'acte, mais, malgré la place qu’elle occupe dans les médias, l'homosexualité reste un phénomène statistiquement très marginal.

POURQUOI ?
La grande question qui revient toujours, pour les homosexuels eux-mêmes, ou pour ceux qui les entourent, c'est pourquoi ? Et là, le débat inné/acquis prend tout son sens.
De nombreuses hypothèses ont été avancées pour tenter d'expliquer l’origine de l'homosexualité. Quels sont les facteurs liés à l'éducation, la structure psychologique, la biologie, etc. ?

FACTEURS PSYCHOLOGIQUES

En premier lieu, des facteurs psychologiques peuvent être à l’origine d’une tendance. Mais il faut ensuite qu’il y ait des processus qui facilitent le passage de cette homosexualité latente à une homosexualité active.
Quelques situations parmi les plus fréquemment rencontrées peuvent servir d'exemples. Elles sont volontairement simplifiées, pour en faciliter la compréhension, car la réalité est toujours plus complexe.

Faute de modèle, un garçon, élevé par une mère à la personnalité très forte, sans présence masculine réelle (absence du père, ou, ce qui est encore plus grave, père physiquement présent, mais sans aucune personnalité) ne peut apprendre à se comporter en homme. Le moment venu, il aura peur des femmes dont il craindra la domination et les fuira.
Au contraire, un garçon dont le père a une personnalité particulièrement forte, voire écrasante pour toute la famille, perçoit son père comme quelqu'un d'inimitable, incapable d'échec. L'enfant ne peut le prendre comme modèle et organisera sa personnalité dans la soumission, la dépendance à autrui et risquera plus facilement de devenir homosexuel.

Un garçon couvé, surprotégé, pourra rester d'une timidité maladive et devenir une proie facile pour un séducteur homosexuel qui lui apportera compréhension et protection.

Un garçon, élevé dans un milieu exclusivement féminin, y compris avec des centres d'intérêt et des jeux féminins, pourra construire sa personnalité sur des modèles féminins.

Une fille qui garde une image trop négative de son père pourra avoir tendance à fuir les hommes.

Une fille qui garde une image trop négative de sa mère pourra refuser sa féminité, adopter un comportement plus viril jusqu'à vouloir dominer une autre femme.

Une fille, privée d'affection maternelle, pourra rechercher dans l'homosexualité une telle affection.

Ces quelques exemples parmi d'autres montrent combien il est nécessaire à un enfant de vivre dans un environnement suffisamment affectif et sécurisant, avec des modèles masculins et féminins qui tiennent bien leur place. Le manque d'équilibre dans l'éducation, une trop grande timidité, un sentiment d'échec ou de dévalorisation, l'absence d'images d'identification saines, une mauvaise répartition des rôles entre les parents, etc. peuvent prédisposer un enfant à l'homosexualité.

À partir du moment où la personne en a pris conscience, par des désirs ressentis en elle-même ou à la suite d’une initiation, l'homosexualité est une pensée obsédante qui s'impose à elle. Cette pensée peut entraîner le passage à l'acte si certaines conditions sont remplies, puis un enfermement quasi définitif dans cette orientation. Il est extrêmement difficile à un homosexuel confirmé de changer d'orientation.

La tolérance, voire l'approbation sociale, très forte aujourd'hui dans notre société occidentale, incite un nombre toujours plus grand de personnes à donner libre cours et à concrétiser leur homosexualité latente. C'est le cas de nombreux adolescents qui passent normalement par une période d'incertitude quant à leur orientation et une certaine timidité à l'égard de l'autre sexe.

Parfois, des personnes ont depuis très longtemps des tendances homosexuelles, mais tout est resté secret jusqu'à une révélation, une découverte accidentelle par un tiers ou jusqu’à ce que la personne assume sa différence et fasse son « coming out ». Il n’est pas rare que des personnes d'âge mûr, le plus souvent des hommes, après une période plus ou moins longue où ils ont caché leur tendance pour tenter de vivre normalement en hétérosexuels, n'aient plus peur d'échouer dans leur intégration sociale et finissent par afficher publiquement leur différence en abandonnant conjoint et enfants, afin de trouver un hypothétique bonheur. Certaines femmes, après une expérience conjugale malheureuse, en viennent à rejeter les hommes et se tournent vers l'homosexualité.

Ces causes psychologiques sont du domaine de l’acquis. Il me semble que l'homosexualité évoque la notion d'erreur dans la construction de la personnalité, « une sorte d’erreur d'aiguillage », liée à l’environnement et au vécu de la personne. Il en résulte une quasi impossibilité de changement sans retour en arrière ni reconstruction sur de nouvelles bases.

L’HYPOTHÈSE DE FACTEURS BIOLOGIQUES

Voyons maintenant l'hypothèse de facteurs biologiques. L'idée selon laquelle des personnes auraient une tendance homosexuelle innée et seraient ainsi de constitution gay est une idée récente qui remonte seulement au XIXème siècle.

Aucune étude sérieuse n’a pu mettre en avant avec certitude des facteurs génétiques. Pourtant, beaucoup retrouvent des pensées homosexuelles dès leurs plus lointains souvenirs et interprètent cela comme une prédisposition innée à l’homosexualité. En fait, il s’agit le plus souvent de souvenirs reconstitués. Après la prise de conscience d’une tendance homosexuelle, tous les anciens souvenirs sont réorganisés en fonction de cette nouvelle identité. Les souvenirs qui vont dans le sens de cette nouvelle identité sont conservés comme des preuves, d’autres sont modifiés selon cette nouvelle interprétation, d’autres sont oubliés. Par exemple, beaucoup de petits garçons ont joué à la poupée et de petites filles avec des jeux traditionnellement masculins, mais l’ont oublié. Les personnes homosexuelles, elles, s’en souviennent, ou s’en re-souviennent.

On n'a pas trouvé chez les personnes homosexuelles de critères caractéristiques, ni dans le fonctionnement hormonal, ni dans l'analyse génétique. Pourtant, quelques études, en particulier sur des jumeaux dont certains avaient la même orientation sexuelle, ont conclu en faveur d'une origine génétique. En fait, bien que les jumeaux soient souvent l'occasion d'observations intéressantes sur le plan de la génétique, de telles études manquaient de rigueur scientifique, en négligeant des facteurs autres que génétiques qui avaient pu intervenir, notamment l’environnement social, psychologique et éducatif.

En m’appuyant sur le témoignage de plusieurs personnes venues me consulter, j'émets l'hypothèse que des perturbations très précoces de l'environnement affectif, probablement même dès la période prénatale, peuvent jouer un rôle. Il en est de même de la façon dont l'enfant reçoit ses premiers soins alimentaires et d'hygiène.

Dans le cas de parents homosexuels, ou simplement qui ont des tendances homosexuelles même inconscientes, il y a une certaine érotisation des premiers soins : baisers sur le ventre ou les fesses, nettoyages plus insistants des parties génitales, étreintes et caresses plus soutenues, voire attouchements sexuels. S'ils agissent inconsciemment, les parents considèrent comme anodins de tels gestes. S'ils agissent consciemment, ils pensent à tort que l'enfant ne va en garder aucun souvenir. Il est maintenant prouvé qu'un enfant peut garder inconsciemment en mémoire la trace d'événements et de sensations très précoces, d'autant plus que, dans les cas que j'évoque, les comportements des parents peuvent perdurer jusqu'à ce que l'enfant en soit totalement conscient.
En fait, cela commence déjà dans la vie intra-utérine car le fœtus peut ressentir et enregistrer inconsciemment les réactions de sa mère et éventuellement de son père à son égard et à l'égard des personnes de l'un ou l'autre sexe.

FACTEURS INNÉS

Tous ces facteurs font donc encore pencher la balance du côté de l’acquis, même si cet acquis peut être très précoce dans la vie de l’enfant. Toutefois quelques éléments innés pourraient être des facteurs favorisants d’une tendance homosexuelle. On constate après coup qu’ils ont pu jouer un rôle, mais il ne s’agit jamais de critères ayant une valeur prédictive et nombre de personnes qui se définissent comme homosexuelles ne sont pas concernées par ces observations.
À titre d’exemples, je mentionnerai :

  • Une certaine fragilité physique ou un aspect peu conforme (retard pubertaire ou aspect efféminé pour des garçons, aspect viril pour des filles),
  • Fonctionnement hormonal, qui agit à la fois sur le développement physique et sur le fonctionnement psychologique,
  • Timidité, tendance à l’introspection.


En constatant que le fonctionnement des structures nerveuses, donc du cerveau, est statistiquement différent entre les hommes et les femmes, certains ont posé l’hypothèse d’un sexe cérébral qui influerait sur le comportement. Mais il ne faut pas oublier d’une part, que la sexualisation des centres nerveux est elle-même, dès le début de la vie, sous l’influence d’hormones et que d’autre part, nombre de personnes présentant ces caractéristiques différentes ne sont pas homosexuelles pour autant.

EXPÉRIENCES

L’initiation, par le plaisir qui l’accompagne généralement, joue un rôle déterminant, et s’agit là encore d’un élément en faveur de l’acquis.

En dehors de certaines expériences subies dans la violence - et encore ! - toute expérience sexuelle comporte la dimension de plaisir, qu’il soit directement sexuel (sensations physiques), affectif (quelqu'un s'intéresse à moi), ou émotionnel (y compris dans la transgression, l’accès au monde « interdit » des adultes).

Le cerveau comprend à la fois une zone particulière, hors de la conscience et du contrôle volontaire, qui gère la sensation de plaisir, et des dispositifs de mémoire. Plus une expérience de plaisir a été forte, plus le cerveau en garde la trace et l'organisme cherche à la renouveler. Si j'insiste autant sur le plaisir, c'est qu'il me semble qu'il y a là une explication de l'importance de l'initiation comme facteur de fixation dans l'homosexualité surtout s'il existe déjà une homosexualité latente. La découverte d’un plaisir lors d’une première expérience a plus d'importance, laisse plus de traces inconscientes que des expériences ultérieures. Il y a enregistrement de cette première expérience comme un modèle, comme la seule valable et à renouveler.

Tout se passe, très souvent, comme s'il y avait une « dépendance homosexuelle » à partir d'une première initiation, passage à l'acte ou expérience émotionnelle homosexuelle, que celle-ci ait été volontaire ou subie (mais la distinction n'est pas toujours très nette à cause de l'homosexualité latente !)

ÉDUCATION CHRÉTIENNE

À plusieurs reprises, j'ai constaté qu'une éducation chrétienne mal équilibrée pouvait elle-même jouer un rôle. Dans une éducation chrétienne trop stricte ou maladroite, la sexualité est souvent encore un sujet tabou, et les gens de l'autre sexe sont présentés comme le danger suprême, risque de perversion et d'immoralité. Aussi, il en résulte souvent une sorte de hantise et un éloignement par rapport aux gens de l'autre sexe. Un jeune élevé ainsi ne se sent bien qu'avec ses pairs, n'y voit aucun danger, et sera totalement désarmé devant une tentation homosexuelle, qu'elle vienne d'un autre ou de ses propres pulsions. J'ai même rencontré plusieurs fois des jeunes qui avaient été séduits et entraînés dans des expériences homosexuelles lors de grands rassemblements évangéliques.

Dans une telle éducation, il y a fréquemment une absence de dialogue qui conduit le jeune à se replier sur lui-même. Cela favorise la masturbation et j'ai déjà souligné l'influence du plaisir.
Faute d'avoir pu en parler, un tel jeune est très seul et fragile devant les pulsions de l'adolescence. Souvent, il n’a pas d’autres informations que celles qu’il peut glaner secrètement ou que lui offre à profusion la société qui l’entoure.

Il arrive aussi que des jeunes chrétiens qui ne se conforment pas à la mode et ne s'affichent pas au collège ou au lycée avec quelqu'un de l'autre sexe soient vite catalogués homosexuels ou « pédés ». Ils en viennent alors facilement à s'interroger sur leur normalité.

CONCLUSION

Je ne prétends pas avoir épuisé le sujet de l’inné et de l’acquis dans l’origine de l’homosexualité.
En m’appuyant sur le témoignage des personnes venues me consulter, je peux dire que, s’il peut parfois exister une certaine prédisposition innée, ce n’est jamais un critère déterminant. L’orientation homosexuelle se construit peu à peu tout au long de l’histoire du sujet depuis sa plus petite enfance, avant même qu’il en prenne conscience, souvent à l’adolescence, à la fois avec l’éveil de sa sexualité et sous l’influence du discours ambiant qui banalise et justifie l’homosexualité.

Il reste donc toujours une part de responsabilité personnelle. Mais compte tenu de l’histoire de la personne, l’acquis peut être très fort et aussi difficile à remettre en cause que si c’était inné. C’est d’autant plus difficile que l’âge est avancé, mais je peux témoigner que, par la grâce de Dieu, tout est possible. Il ne faut pas simplement attendre une réponse à la prière, mais cela implique un travail profond sur soi-même qu’il faut avoir le courage d’entreprendre.

Auteurs
Roger EYKERMAN

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