Chapitre 3 - L’athéisme des dernières décennies en France

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Chapitre 3 - L’athéisme des dernières décennies en France

Jean-Paul Sartre et Albert Camus, les deux plus grandes figures philosophiques françaises du 20ème siècle, se disaient tous les deux athées.

Jean-Paul Sartre

Pour Jean-Paul Sartre, Dieu n’existe pas. L’athéisme va de soi et il ne l’argumente même pas. Mais la conséquence en est que l’homme est obligé de trouver lui-même les bases de sa morale et qu’il est libre de définir cette morale lui-même. Aucune norme imposée par un être transcendant n’indique à l’être humain ce qu’il doit faire. L’homme est libre, « condamné à être libre » comme l’écrit Sartre dans L’existentialisme est un humanisme (1946).

En tant qu’existentialiste, Sartre affirme que son engagement n’est pas le fait du simple spectateur, mais la nécessité de vivre sa vie en tant qu’acteur. Et il faut s’engager de façon responsable, autrement on est de mauvaise foi. Sartre en a une vision très noble : « Ainsi notre responsabilité est beaucoup plus grande que nous ne pourrions le supposer, car elle engage l’humanité entière » (L’existentialisme est un humanisme). On voit donc que Sartre se distance de Nietzsche, et ne ménage pas ses efforts en faveur de dissidents et de minorités. Son engagement moral et politique est bien connu… mais on a parfois du mal à voir comment ses choix découlent de sa philosophie et comment il généralise son engagement à l’échelle de l’humanité. D’autant plus qu’il sait que ce qui s’oppose à la liberté humaine, c’est la volonté d’autrui qui peut provoquer un sentiment d’aliénation. Comme le dit Garcin dans Huis Clos : « L’enfer, c’est les autres ».

Albert Camus

De son côté, Albert Camus est également humaniste, et philosophe de ce qu’il appelle l’absurde : « L’absurde naît de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde » (Le mythe de Sisyphe, 1942). En un mot, il ne trouve pas de réponse quant à sa raison d’être : « Je ne sais pas si ce monde a un sens qui le dépasse. Mais je sais que je ne connais pas ce sens et qu’il m’est impossible pour le moment de le connaître. Que signifie pour moi une signification hors de ma condition ? » (Le mythe de Sisyphe). Et c’est là que l’on perçoit encore que l’athéisme est non argumenté, comme une démarche a priori. Cependant, Camus est obligé de constater l’existence d’un sens en creux : « tout ce qui exalte la vie accroît en même temps son absurdité » (Les noces, 1938), mais il rejette les religions parce qu’« on n’y trouve aucune problématique réelle, toutes les réponses étant données en une fois » (L’homme révolté, 1951). Entre parenthèses, je fais remarquer qu’il s’agit de nouveau de « religions » et non pas de Dieu. Pour sa part, Camus veut se limiter aux réponses humaines et « se retrouver dans la seule valeur qui puisse les sauver du nihilisme, la longue complicité des hommes aux prises avec leur destin » (L’homme révolté). C’est tout le sens de l’héroïsme ordinaire du docteur Rieux dans le roman célèbre de Camus, « La peste », puisque pour Camus, Rieux incarne un idéal d’humanité.

Penseurs contemporains

Michel Onfray

Aujourd’hui, dans le monde francophone, les approches de ceux qui se disent athées sont diverses, entre le militantisme d’un Michel Onfray, et le regard plus paisible d’un André Comte-Sponville ou d’un Luc Ferry.

Michel Onfray, fondateur de l’Université populaire de Caen, cherche à promouvoir une vision du monde hédoniste et athée. Que penser de sa défense de l’athéisme ? Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne mâche pas ses mots : « Les trois monothéismes, animés par une même pulsion de mort généalogique, partagent une série de mépris identiques : haine de la raison et de l’intelligence ; haine de la liberté ; haine de tous les livres au nom d’un seul, haine de la vie ; haine de la sexualité, des femmes et du plaisir ; haine du féminin ; haine des corps, des désirs, des pulsions » (Traité d’athéologie, 2005). 

En ce qui me concerne, je me souviens de...

Auteurs
David BROWN

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