Convictions baptistes et catholiques sur le baptême

Complet L'œcuménisme

Un nouveau texte du Comité mixte baptiste-catholique de France

En 1992, le comité mixte publiait "Rendre témoignage au Christ" qui reprenait le rapport des conversations internationales entre baptistes et catholiques en lui ajoutant des introductions et des commentaires liés à la situation française. Depuis lors, le comité a continué de travailler. Il souhaite aborder de front les grandes questions qui aujourd'hui séparent catholiques et baptistes. Le baptême est sans doute le lieu privilégié et symbolique de nos différences. C'est donc sur lui que porte le premier texte qui présente les points d'accord et de désaccord auxquels ont abouti les échanges pendant près de quatre années. Il sera suivi d'autres textes qui développeront la même approche et aborderont les questions de la Cène, des ministères, etc.
Ces textes ne se veulent que le résultat d'une écoute mutuelle honnête, respectueuse et fraternelle et se terminent sur des pistes pour poursuivre le dialogue. C'est dans cet esprit que ce premier texte (qui date de 1998) est publié et que nous souhaitons qu'il soit largement utilisé. Le prochain portera sur la Cène.

Abonnement aux Cahiers de l'École pastorale

Je m'abonne

Convictions baptistes et catholiques sur le baptême

CE QUE NOUS POUVONS DIRE ENSEMBLE :

Baptistes et catholiques s'accordent sur les points suivants :

Le Seigneur Jésus-Christ a institué le baptême, en commandant à ses apôtres de faire de toutes les nations des disciples et de les baptiser au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit (Mt 28.19).

Le baptême est le signe visible d'une grâce invisible, selon une définition traditionnelle des sacrements. La grâce signifiée par le baptême est la naissance du baptisé à une vie nouvelle et son entrée dans la Nouvelle Alliance entre Dieu et les hommes.

Cette alliance a été scellée par la mort et la résurrection du Christ. Elle est un don de Dieu aux hommes, à la fois pardon des péchés et vie nouvelle par le Saint-Esprit.

L'acte du baptême exprime symboliquement la nouvelle naissance du croyant, son passage de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière par l'union du baptisé avec le Christ mort pour ses péchés et ressuscité pour sa justification. Ainsi, l'apôtre Paul peut écrire aux chrétiens "Considérez que vous êtes morts au péché et vivants pour Dieu en Christ-Jésus" (Rm 6.11).

Le baptême d'eau est le signe du don de l'Esprit sans lequel il n'y a pas de vie nouvelle. "Être chrétien, c'est avoir reçu l'Esprit, qui fait de nous des fils(1). Selon la promesse du Seigneur (Jn 7.36-38, Ac 2.38), le Saint-Esprit vient habiter dans le croyant, lui donnant l'assurance de son adoption comme enfant de Dieu et lui permettant de mener une vie nouvelle.

Le baptême est également signe de l'insertion du chrétien dans l'Église, corps du Christ. Dieu l'unit à tous ceux qui, sans distinction de race, de sexe, de position sociale, constituent son peuple sur la terre.

Le baptême n'est pas un acte unilatéral. Pour être reçu, il demande de la part de l'homme la réponse de la foi (Mc 16.16, Ac 2.38). "La réception du baptême par le croyant est son acte visible de réponse confiante à la grâce prévenante de Dieu en Christ"(2). Le baptisé confesse qu'il s'est remis à la grâce de Dieu pour vivre. Il témoigne qu'il appartient désormais à Dieu et s'engage à son service. C'est ce qu'indique le sens premier du terme "sacramentum", serment sacré.

QUESTIONS SUR LESQUELLES NOUS NE SOMMES PAS PARVENUS À UN ACCORD :

Des différences subsistent principalement

a) sur la question de l'efficacité du baptême ;
b) sur celle du baptême des petits enfants ;
c) et donc sur celle de la reconnaissance des baptêmes administrés dans l'autre Église.

a) la question de l'efficacité du baptême

Pour les catholiques, le signe a lui-même son efficacité propre, car il n'est pas extérieur à ce qu'il signifie. La liberté de l'Esprit est certes affirmée, mais la fidélité de Dieu à ses promesses l'est également. Il s'ensuit que le baptême effectue ce qu'il signifie. Il est en lui-même nouvelle naissance d'en haut, il confère l'adoption filiale, il engendre l'homme à la vie nouvelle. Par le baptême, l'Esprit vient habiter dans le fidèle. En un mot, le sacrement accomplit par un acte, le don de Dieu que la parole annonce.

Jésus-Christ en effet a confié à son Église le service de la Parole et des sacrements, afin qu'elle transmette aux humains les grâces du salut. Mais l'action du sacrement n'a rien de magique. Elle a plutôt la forme d'une prière, une prière dont l'exaucement est certain puisqu'elle s'appuie sur la promesse du Christ.

La réalité du sacrement du baptême ne dépend pas de la foi du baptisé, mais de l'Esprit de Dieu qui agit par l'Église. Cependant, le baptême doit être reçu dans la foi. Si le baptisé ne répond pas à la grâce de Dieu par la foi, son baptême reste incomplet et sans force. En termes classiques, il est valide (puisqu'il demeure bien un acte du Christ), mais il n'est pas encore fructueux (puisque le manque de foi du baptisé oppose un obstacle à la grâce de l'Esprit). Il reste donc provisoirement inopérant. La plénitude du sacrement, c'est l'ensemble baptême-confession de foi et conversion dans la charité. La justification de l'homme a lieu, selon la tradition catholique, au moment où l'homme pécheur s'ouvre, sur le fondement de sa foi et de son espérance, à la charité. Cette justification n'a donc pas lieu forcément à l'instant même du baptême : chez le catéchumène, la grâce du baptême est normalement anticipée au cours de sa préparation. Chez le baptisé qui aurait manqué de foi lors de son baptême, elle surviendra après la conversion de celui-ci à la foi et à la charité. Chez le chrétien baptisé tombé dans le péché, elle peut être perdue, puis retrouvée en fonction de la même conversion.

Pour les baptistes, le baptême célèbre et atteste la nouvelle naissance d'en haut, mais ne l'effectue pas. La grâce divine est offerte aux hommes dans l'annonce de la Parole, qui est un appel à croire et à recevoir le don de Dieu. Il est évident que la source de ce don est en Dieu. Mais c'est seulement lorsque la Parole est reçue par la foi que l'Esprit de Dieu est donné au croyant, faisant de lui un enfant de Dieu, un homme nouveau en Christ. Les baptistes ne reconnaissent à aucun rite le pouvoir d'effectuer des changements aussi fondamentaux que la conversion et la naissance à la vie de l'Esprit. Seule les opère une relation personnelle de foi établie entre la personne et Dieu. Le baptême célèbre cette relation et atteste que les promesses de Dieu à ceux qui croient s'appliquent à ce croyant. Ces promesses, dans le Nouveau Testament, sont données à ceux qui croient. Dans les quelques textes où elles sont également liées au baptême, la foi est presque toujours mentionnée parallèlement. Tous les exemples de baptêmes donnés dans le Nouveau Testament sont des baptêmes de personnes ayant confessé leur foi en Jésus-Christ.

D'autre part, aux yeux des baptistes, la gratuité du don de Dieu est mise en danger si elle est liée à un rite humain. La foi n'est plus pur accueil du don, mais le résultat d'un acte de l'Église. Or, si c'est l'Église qui baptise d'eau, c'est le Christ qui baptise d'Esprit.

b) Le baptême des petits enfants

La conséquence logique de la conception baptiste, c'est que le baptême ne doit être administré qu'à des croyants (pas nécessairement à des adultes : ce qui importe ce n'est pas l'âge, mais la libre confession de foi du baptisé). Il semble aux baptistes que le baptême des petits enfants, qui n'est pas attesté explicitement dans le Nouveau Testament, voile dangereusement la signification du baptême en le séparant de l'adhésion de foi du baptisé. Il laisse croire que les baptisés sont nés à une vie nouvelle et ont reçu le Saint-Esprit sans avoir cru en Jésus-Christ. Il permet de définir l'Église comme "le peuple des baptisés", alors qu'un très grand nombre de baptisés ont rejeté Jésus-Christ, consciemment ou non.

Pour les baptistes (c'est là une de leurs convictions centrales), l'Église est le peuple des croyants. Seule la foi crée l'appartenance à Jésus-Christ et à l'Église, qui est son corps.

L'Église catholique reconnaît que la forme normative du baptême est le baptême des croyants. Elle estime que le baptême des petits enfants se justifie : il est le fait d'une pratique traditionnelle attestée dès les premiers siècles ; il s'enracine dans l'attitude de Jésus à l'égard des enfants, il manifeste une compréhension communautaire de la foi. La foi de la communauté, exprimée par celle des parents, supplée à la foi que l'enfant n'est pas en mesure de confesser. Le baptême des enfants souligne la priorité de l'appel de Dieu par rapport à la foi de l'homme. Il s'inscrit dans un cheminement : les parents ou les responsables de l'enfant s'engagent à introduire progressivement l'enfant dans une démarche catéchuménale. Le baptême demande en effet qu'une catéchèse post-baptismale soit donnée au baptisé. Son aboutissement sera la confession personnelle de sa foi. La réalité du baptême embrasse donc la totalité de ce processus dont l'unité s'inscrit dans le temps. Un baptême d'enfant qui n'aboutirait pas à cette confession personnelle de foi resterait valide, mais ne serait pas fructueux.

c) La reconnaissance du baptême

L'Église catholique n'a pas de difficulté à reconnaître la validité du baptême des baptistes, administré avec l'eau au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

Du côté baptiste, on ne reconnaît comme valide qu'un baptême de croyant administré avec l'eau au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Il y a là un vrai problème douloureux. Mais cela n'empêche pas les baptistes de reconnaître chez les autres chrétiens qui partagent la même foi en Christ et ont donc reçu le Saint-Esprit, des frères en Christ, même s'ils n'ont pas été baptisés sur profession de leur foi.

QUELQUES DOMAINES OÙ LA RÉFLEXION DOIT ÊTRE POURSUIVIE

1) Les baptistes demandent : Comment faut-il comprendre la notion de causalité sacramentelle ? Dans quel sens peut-on dire que l'œuvre de Jésus-Christ "s'exerce dans le baptême en même temps qu'elle s'exprime", même lorsque le baptisé n'est pas en mesure de confesser sa foi et que rien n'atteste la présence de cette foi ?

2) Quel rapport y a-t-il entre le baptême de l'Esprit et le baptême d'eau ? Comment l'exprimer dans nos pratiques liturgiques ?

3) Les catholiques posent la question : quelle est la place des enfants non-baptisés dans une église baptiste ? N'y a-t-il pas risque d'obscurcir l'amour que le Christ leur porte et la sainteté que leur reconnaît l'apôtre Paul (1 Co 7.14) ?

4) Qu'en est-il du baptême des enfants en âge scolaire dans la tradition catholique ? A partir de quel âge un enfant peut-il être baptisé dans la tradition baptiste ?

5) Bien que l'immersion ne soit pas pour les baptistes une question aussi décisive que celle de la confession de foi, le catholicisme n'a-t-il pas perdu quelque chose d'important en l'abandonnant dans la pratique (quoique le rituel le prévoie) ?

Recevez ce numéro
au format papier

7 €

J'achète ce numéro

Ce numéro sera bientôt disponible à l'achat au format numérique.

Abonnement aux Cahiers de l'École pastorale

Je m'abonne

Informations complémentaires

(1) Pour la communion des Églises (L'apport du Groupe des Dombes 1973-1987), Paris 1988, p. 140.
(2) G.W.H. Lampe: The seal of the Spirit. Londres 1951, p. 165.

Vous aimerez aussi

Ajouter un commentaire

Votre adresse e-mail nous permet :

  • de vous reconnaitre et ainsi valider automatiquement vos commentaires après 3 validations manuelles consécutives par nos modérateurs,
  • d'utiliser le service gratuit gravatar qui associe une image de profil de votre choix à votre adresse e-mail sur de nombreux sites Internet.

Créez un compte gratuitement et trouvez plus d'information sur fr.gravatar.com

Chargement en cours ...